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L’intégration en milieu scolaire vue depuis l'expérience
 menée au collège de  la Durantière

plan de la page :

1°) Personnes concernées

) Les différentes formes d’intégration  

3°) L’intégration en terme de projet et de contrat

4°) Les conditions de réussite de l’intégration en milieu scolaire

5°) Quels éléments vont dicter le choix dans la forme de  l’intégration ?

Si le handicap n’a que des conséquences matérielles

Si le handicap a des conséquences sur les apprentissages 

pour conclure

1°) Personnes concernées  

Collégiens handicapés moteurs, déficients visuels, sourds, avec ou sans troubles associés.

Les troubles associés peuvent être :

  •  handicap moteur et sensoriel

  •  handicap visuel et auditif

Sont exclus de cette association :    

  •    handicap intellectuel

  •  Troubles du comportement gênant gravement une vie sociale en milieu scolaire ordinaire.

 

Ces personnes sont reconnues par les CCPE – CCSD – CDES qui s’appuient sur une enquête comportant quatre versants :

  • Médical

  • pédagogique

  • psychologique

  • social.

L’adéquation entre la structure et le handicap du jeune est prononcée sous forme d’une proposition faite aux familles qui, si elle est acceptée, est alors notifiée. Elle peut définir le mode d’intégration (individuelle ou collective).


 

2°) Les différentes formes d’intégration  

Etre intégré dans un groupe, c’est vivre dans ce groupe, adhérer à ses objectifs et en profiter, y être reconnu, participer à ses activités, à ses évolutions. C’est être membre du groupe.

 

Selon le groupe de référence, l’intégration sera donc :

  • sociale

  • scolaire

  • professionnelle

Selon le degré d’appartenance au groupe, l’intégration pourra être :

  • Individuelle : le jeune handicapé est seul à être handicapé dans le groupe. C’est le cas des jeunes soutenus par un service (SSESAD – SSEFIS – SAAAIS).

  • Semi-collective : plusieurs handicapés vivent au rythme d’un groupe. C’est le cas des intégrations au Lycée des Bourdonnières.

  • Collective : les jeunes handicapés sont regroupés en groupes de besoins (en CLIS, UPI, classes spécialisées). Ces groupes pédagogiques sont installés dans des collectivités scolaires ordinaires. C’est le cas au Collège de la Durantière, au Lycée Professionnel Leloup-Bouhier, et dans plusieurs écoles primaires : à Nantes : les Agenets - Carcouet - Emile Péhaut ; à Rezé : Y. et A. Plancher ou à    St Nazaire : Ernest Renan - Jean Jaurès.

  • Partielle : le jeune handicapé est intégré individuellement pour certains cours, collectivement pour d’autres. Par exemple, il est en classe spécialisée pour le français, les mathématiques … et en intégration individuelle pour l’E.P.S, le dessin…


 

 

3°) L’intégration en terme de projet et de contrat  

L’intégration répond à plusieurs dynamiques de projet :

Projets réglementaires :  

  • Loi d’orientation de 1975  

  • Circulaires de 82 – 83  

  • Nouvelles annexes XXIV (1989)  

  • Handi.Scol (1999)

  • Loi 2002-2

 

Projet académique définissant les grands axes de la politique éducative de l’académie.

Projet d’établissement : les intégrations collectives sont permises par une orientation particulière d’établissements organisés pour l’accueil d’une population handicapée (ex : la Durantière, Leloup Bouhier, les Bourdonnières).

Projet individuel : l’intégration d’un jeune handicapé fait l’objet d’un contrat d’accueil qui définit les objectifs, les moyens, les partenaires, l’évaluation, et s’accompagne d’une convention lorsque parmi ces partenaires interviennent des personnes associées à l’Education Nationale. C’est le cas de toutes les intégrations collectives ou individuelles soutenues par un SSESAD, SSEFIS, SAAAIS dépendant d’une association comme l’A.P.A.J.H qui intervient en partenariat avec l’éducation nationale.  

Ce projet est évolutif, impose une évaluation annuelle. Il dépend :  

  • de l’attente, de la volonté de la famille,  

  • du degré du handicap du jeune, de ses potentialités, de son évolution,  

  • des équipements existant à chaque stade de sa scolarité, et de l’évolution de l’histoire de cette scolarité. 

 

Ce n’est pas l’existant qui doit commander cette histoire, mais le projet qui doit faire évoluer l’existant.  

Pourtant, lorsque le jeune handicapé grandit, les choix de formes d’intégration diminuent :

 

Maternelle et primaire : toutes les formes d’intégration sont possibles (individuelle – partielle – collective).

 

Collège : toutes les formes d’intégration sont possibles mais l’intégration collective n’existe qu’à la Durantière. Les plus éloignés doivent avoir recours à l’internat.

 

Lycée professionnel : si l’on doit avoir recours à une forme collective d’intégration, les choix professionnels se limitent au tertiaire (Leloup Bouhier). Pour d’autres formations, il faut s’éloigner (Rennes, Toulouse).

 

Lycée général : Il n’y a plus que des intégrations individuelles ou semi-collectives (les Bourdonnières). Si une forme collective d'intégration s’avère nécessaire, il faut s’éloigner (Rennes, Angers, Toulouse, Nevers, Vaucresson…)  

 


 

4°) Les conditions de réussite de l’intégration en milieu scolaire  

 

Qu’est-ce qu’une intégration réussie ?

 

C’est une intégration qui prépare de manière forte l’intégration professionnelle et l’intégration sociale, c’est à dire la possibilité de trouver sa place, d’être accueilli, d’être reconnu dans un large groupe social.

 

Il y a donc :

 

deux acteurs :

  • le groupe d’accueil  

  • la personne handicpée

                       

  et trois partenaires :  

  • la famille

  • l’école  

  • le service de soutien à l’intégration  

 

Le groupe d’accueil 

il est lui même fait de l’intégration de chacun de ses membres. Il est accueillant s’il a reconnu les membres qui le composent.  

  • La non-reconnaissance peut venir d’une peur de l’autre, d’une peur de sa différence. L’habituation, l’expérience vont estomper ces peurs. Les enfants qui ont côtoyé des camarades handicapés seront ensuite des adultes plus accueillants. Ils ont appris à dédramatiser, à banaliser la différence. Les jeunes valides de la Durantière, de Leloup Bouhier, des Bourdonnières sont habitués au handicap, et l’accueil se fait naturellement.  

  • La non-reconnaissance peut aussi venir d’une différenciation exagérée de la personne handicapée : appel à la charité, au devoir. Intégrer, accueillir ne doit pas être un « exercice » de citoyenneté mais un mouvement naturel, non conscient, non imposé (parfois aidé, cependant).  

  • La non-reconnaissance peut enfin venir d’une réelle impossibilité à partager les mêmes règles. Tous les groupes ne peuvent pas accueillir toutes les formes de handicaps. Pour être réussie, l’intégration doit d’abord être possible.

La personne handicapée

elle est le deuxième acteur de l’intégration. Il faut qu’elle même la souhaite, et qu’elle adhère à l’identité du groupe. Cela n’est pas toujours vrai. Il y a par exemple des sourds qui subissent le mouvement intégratif et qui revendiquent leur appartenance à une communauté sourde. Il faut les « entendre ».

Parfois, la situation d’intégration va révéler encore plus la différence si celle-ci devient « difficulté ». C’est alors la pire des ségrégations, celle qui accentue le handicap.

 

Les partenaires de l’intégration : 

ce sont ceux qui vont la mettre en œuvre, la faciliter :  

  • La famille : plus la famille est présente, et plus l’intégration est facilitée. La volonté d’intégration part le plus souvent de la famille. C’est une volonté re-normalisante, mais qui peut parfois conduire à une déresponsabilisation du jeune, à l’acharnement pédagogique et psychologique, au sur-menage, à l’épuisement, et finalement au désinvestissement.  

  • L’école - les équipes enseignantes : depuis la loi de 75, l’école a l’obligation d’intégrer. Mais il faut aussi poser l’intégration en terme de projet, pour le groupe et pour le jeune intégré.

    Le projet doit prévoir les conditions techniques (accessibilité aides matérielles), les objectifs (apprentissages - acquisitions). Les moyens à mettre en œuvre (auxiliaires d’intégration – soutiens – pédagogie spécialisée – rééducations).  

Semblables et différents sont les deux bornes du projet.

 

  • Semblables : les outils de l’école permettent d’évaluer les potentiels et les acquis, et de les re-situer dans le contexte des semblables.

Les tests d’évaluation, les examens (brevet des collèges, baccalauréat…) les moyennes d’âges dans un cycle, les taux de redoublement, les observations des orientations après la 3ème… sont des outils d’évaluation permis par l’éducation nationale qui re-situent la population handicapée. C’est un grand bénéfice de l’intégration que cette référence à la normale.

Sans cela, la surévaluation est un risque. On est souvent tenté de surestimer ou de se contenter d’un minimum si l’on perd les repères aux « semblables ».

 

  • Différents : l’intégration ne doit pas vouloir gommer la différence : elle existe, et elle est importante. S’intégrer, c’est au contraire avoir le droit de bien vivre avec sa différence, d’être heureux dans le groupe malgré cette différence, d’apporter au groupe par cette différence.

Pour les enseignants, cela demande une connaissance des conséquences du handicap, et des techniques pédagogiques appropriées. (Formation, et contacts réguliers avec les spécialistes des équipes de soutien à l’intégration).

L’intégration collective est souvent une solution heureuse lorsque cette différence est importante : difficultés de rythme et d’exécution , difficultés logiques , fatigabilité .            

Elle permet au jeune de vivre socialement en intégration (statut d’élève - vie scolaire avec les valides) tout en étant reconnu dans sa différence, dans ses difficultés.

 

 

Les équipes de soutien à l’intégration :

  • pour les handicapés moteurs le SESSAD

  • pour les sourds le SSEFIS

  • pour les déficients visuels leSAAAIS

 

Ces équipes d’éducation et de soins apportent à la communauté scolaire et au jeune handicapé les soutiens nécessaires :

           

  • recherche de solutions matérielles et techniques  

  • information des enseignants

  • aide individuelle auprès du jeune  

Une convention définit leur participation dans le projet intégratif. Mais si elles sont une aide importante, elles doivent veiller à ne pas déresponsabiliser le jeune, la famille, ou même l’école.

 

C’est parfois un écueil difficile à éviter :

Les services de soutien à l’intégration sont souvent « utilisés » par la famille comme outil de pression, moyen de contrôle et d’ingérence dans le projet d’établissement. Le premier responsable de l’intégration doit rester l’Etablissement Public Local d’Enseignement.

 

Le service (SESSAD, SSEFIS, ou SAAAIS) vient en appui sans sur-protéger, dé-responsabiliser, ou marginaliser le jeune. Il doit rester discret : trop d’encadrement atteint l’enfant dans son identité, sa propre énergie à s’intégrer, son autonomie, son reste de liberté de temps libre. Les équipes pédagogiques ne doivent pas se « décharger » sur le service : ce ne doit pas être un précepteur qui « squatte » l’école.  

 


   

5°) Quels éléments vont dicter le choix dans la forme de l’intégration ?  

Si le handicap n’a que des conséquences matérielles

 

(accessibilité - code de communication - aides techniques) : l’intégration individuelle peut facilement être envisagée, une fois étudiés les aménagements de transport, de salles de classe, de poste de travail, et éventuellement d’interventions dans certains actes de la vie quotidienne (auxiliaire d’intégration) définis dans un projet d’accueil.

 

Cependant , trois risques sont à éviter : 

  •   le déploiement d’une artillerie de matériel qui créerait un environnement marginalisant. Autant alors avoir recours à un établissement où cet environnement est banalisé (intégration collective).  

  • la présence trop importante d’une tierce personne qui finit par dédoubler le jeune, fondre son identité, l’envahir.  

  • l’appel trop important à la solidarité, qui finalement va demander au jeune de payer en retour cette intégration.  

   

L’intégration individuelle doit se réaliser dans le Collège ou Lycée du secteur scolaire pour s’accompagner d’une intégration sociale dans le quartier. Il faut éviter toute carte scolaire d’établissements « intégratifs » (sauf pour les intégrations collectives).

 

Si le handicap a des conséquences sur les apprentissages 

ou sur la personnalité, l’intégration collective est une réponse qui permet une intégration sociale tout en reconnaissant le handicap.

 

Vouloir gommer le handicap par une intégration acharnée n’est pas souhaitable. La personne handicapée doit vivre avec ses aptitudes, et trouver un lieu qui les valorise.

 

Certes, ce lieu d’intégration collective n’est plus de « proximité ». Pour offrir une large technicité, des options, des outils variés, un regroupement doit s’adresser à un nombre important de jeunes (la Durantière recrute sur six départements). Mais si ce déplacement vers la structure entraîne un dépaysement (internat, coupure du tissu social du quartier), il créée une dynamique importante dans la reconnaissance du droit à la différence. Le sentiment « d’anormalité » disparaît lorsqu’on peut se mesurer à des jeunes « comme soi ».

 

A la Durantière, ce regroupement pédagogique s’est fait en « mélangeant » les handicaps, parce qu’il n’y avait pas, au départ, d’effectif suffisant pour créer une unité pédagogique par handicap visuel, moteur, ou auditif. On partait donc de l’idée d’une réponse au handicap en général, s’adaptant de manière individuelle à chacune des déficiences.

         

Beaucoup d’aspects positifs se sont dégagés :  

  • dédramatisation (pour chacun, le handicapé, c’est l’autre handicap) ;  

  • diversification des recherches, intérêts, et savoir-faire (les enseignants se sont investis, chacun, vers des handicaps différents) ;  

  •   traitement des difficultés plus par niveau que par déficit ;  

  • plus grande émulation ;  

  • la différence est vécue comme objective, particulière et partielle.  

 

Bien sûr pour éviter l’écueil de l’établissement spécialisé (L’EXCEPTION !) la structure qui pratique l’intégration collective doit activer toutes les occasions d’intégration sociale :  

  • projets d’action éducative communs  

  • récréations, repas, foyer socio éducatif communs  

  • évaluations, contrôles, communs  

  • intégrations partielles  

                       

A la Durantière, les enseignants interviennent, pour chaque niveau, sur les deux structures (classes spécialisées et classes ordinaires) pour garder une référence à la normale, et conserver auprès de l’élève handicapé le statut de « PROFESSEUR ».  

 

Cette intégration collective profite à toute la structure. Les jeunes valides y apprennent à accueillir la personne handicapée. Les savoir-faire acquis par les enseignants pour répondre à la problématique du handicap sont souvent transférables aux autres élèves.

 

L’intégration partielle (le jeune quitte la classe spécialisée pour être intégré individuellement dans une discipline où il est plus performant) est une formule intéressante qui l’aide à ne pas se vivre « globalement handicapé » mais « gêné » dans certains domaines ; elle va dans le sens de son besoin d’être reconnu et accepté différent.

 

Enfin, et pour conclure,

 

les formules intégratives peuvent être vécues comme des étapes, des lieux de recours qui évoluent. Le droit à la différence, c’est aussi le droit aux remédiations différentes, selon les étapes de son histoire.

 

D’aucun commencera en intégration individuelle, puis viendra souffler ou se refaire une santé (une identité) en intégration collective, avant de repartir affranchi vers l’intégration individuelle.

 

Un autre pourra vivre les apprentissages fondamentaux en intégration collective et réussir ensuite son intégration individuelle.

 

Un troisième devra bénéficier toujours d’un traitement collectif de sa différence dans un contexte préservant son intégration sociale.

 

Un autre aura recours à l’établissement spécialisé ou à l’intégration collective seulement au moment de la formation professionnelle…

 

… Pourvu que le projet soit inscrit en terme de réussite et de bien-être 

L’intégration, c’est finalement être accepté, et s’accepter.

 

Guy GILLOT